Salut Franck,
Moi non plus, Waterloo n’est pas ma tasse de thé (clin d’oeil british). Le travail dont je vous ai fait profiter fut réalisé à l’occasion de mon intervention au colloque «Le Vol de l’Aigle» auquel j’ai participé à Lyon. Je n’ai donc pas fouillé plus que de besoin pour le fil directeur choisi consistant à mettre le doigt sur les erreurs plutôt que de rabâcher des choses déjà mille fois répétées par d’autres.
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Pour l’engagement de la division Jérôme je pense avoir répondu, mais j’ajoute que le prince impérial n’était chef que pour la galerie, et ne devait son très jeune commandement qu’à sa qualité de frère de l’Empereur. Dans le même genre de «piston» nous avons le prince d’Orange dans l’Armée des Pays-Bas et le prince Wilhelm dans l’Armée du Bas-Rhin.
Il est partout dit que Jérôme avait pour «mentor» le GD Guilleminot qui commandait réellement la division. Il est fait grand cas de cet officier qui fut volontaire dès 89, mais aussi aide de camp de Moreau en 1800, ce qui explique peut-être un avancement tardif. GB en 1808, GD en 1813 sous Oudinot, ce qui ne lui permet pas de briller (Gross Beeren et Dennewitz !). Ensuite Mayence... puis Waterloo. Il signera ensuite la capitulation de Paris. C’est vraiment le général Padubol !
De fait on ne parle pas plus de lui que de Reille en terme d’action menée personnellement dans cette campagne. A croire qu’ils n’étaient pas là... et comme Bauduin s’était fait descendre d’entrée, ce fut le colonel de Cubières qui commanda la magnifique première brigade de la 6e division, jusqu’à ce qu’il se fasse abattre à son tour en s’entêtant à exécuter la mission engagée.
Ayant un peu gratté pour te répondre il semble bien que ce soit Jérôme qui ait ordonné l’engagement successif mais total de sa division contre le château d’Hougoumont... mais le prince assure dans ses mémoires avoir reçu personnellement et directement de l’Empereur l’ordre de s’en emparer à tout prix... Ce qui expliquerait aussi que n’ayant plus de troupes à commander il ait été rappelé par Napoléon... qui oubliera à Sainte-Hélène de mentionner qu’il était aussi l’auteur de cette erreur-là.
Foy s’est contenté de se maintenir à la hauteur de l’avance de la 6e division, lui donnant de temps à autre un coup de main en bon camarade (il finira par engager de la sorte la moitié de son monde)... et Bachelu le reliait tant bien que mal vers la droite et le 1er corps, ce qui était sa mission.
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Mon «décompte» à 12000 hommes sous Mouton ressort de l’addition de tout ce qui releva peu ou prou de lui ou de son secteur ce jour-là soit :
Divisions d’infanterie Simmer et Jeanin, 6960 fantassins et 598 artilleurs
Divisions de cavalerie Domon et Subervie, 2164 cavaliers et 347 artilleurs
Division de cavalerie Jacquinot*, 1426 cavaliers et 158 artilleurs
Réserve d’artillerie du VIe corps, 395 artilleurs
Total des troupes ci-dessus : 12058 hommes**.
* La division Jacquinot relevait du Ier corps d’Erlon qu’elle flanquait à droite... mais se
trouva «concernée» par le combat de Mouton dès le tout premier coup de canon prussien qui lui enleva plusieurs de ses officiers, l’obligeant à faire d’urgence un face à droite. Jacquinot prit d’ailleurs le commandement supérieur de la cavalerie du secteur, Subervie passant sous ses ordres.
Voir à ce propos (en particulier la page 11) du lien ci-dessous :
http://www.planete-napoleon.com/docs/Dumanoir.pdf** Auxquels il convient toutefois de défalquer les 224 h relevant de la batterie de 12 £ qui reçut l’ordre de rejoindre la grande batterie... où elle n’arriva jamais, étant une des deux batteries qui se firent hacher menu par les Scots Greys qui les trouvèrent en marche sur le trajet de leur charge folle.
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Alors oui, je persiste et signe, Waterloo est une incroyable accumulation d’erreurs tactiques qui succèdent aux erreurs stratégiques des jours précédents.
Mais malgré elles, sans l’intervention des Prussiens c’en était fait des Anglais, et cela s’est vraiment joué à une ou deux heures près... de quoi regretter le temps perdu qui, c’est bien connu, ne se rattrape jamais !
Quoi qu’il en soit, une victoire in extrémis au soir, dans les conditions où s’était déroulé ce qui avait précédé, eut été une victoire à la Pyrrhus et pire (non, pas Épire !) dont la prise de Bruxelles, si encore on y parvenait avec les Prussiens «dans les pattes» à «négocier» avant d’avancer sur la ville, n’aurait pas compensé les pertes effroyables subies... qu'on aurait certes pu cacher à l'ennemi mais pas à soi-même.
Ceci dit le vent du boulet était passé près du bicorne de «Welly», d’où sa phrase qui, effectivement ne fut pas motivée par les 4000 fantassins français épuisés du secteur, mais, et c’est un artilleur qui te le dit, par les quatre, oui, seulement quatre, pièces à cheval françaises de la Garde, enfin amenées là ou on aurait pu et du en amener deux douzaines depuis longtemps... Encore est-ce Ney en personne qui alla les chercher.
En quelques vingt minutes ces quatre pièces étaient en effet entrain de «démâter le Victory» !
C’est peu ou prou dans ce laps de temps que sont tombés Fitzroy Somerset, Gordon, de Lancey, Alten, Kielmansegge, Colin Halkett, le prince d’Orange, et j’en oublie sûrement, qui tous tentaient d’avancer vers la batterie pour la faire taire où seulement de tenir sur place sans espoir de bonne fin puisqu’aussi bien le général Lambert envoya alors ses drapeaux sur les arrières de crainte de les perdre sous peu faute d’hommes pour les défendre.
Le 27th Inniskilling subit là 2/3 de pertes et l’on put dire qu’il était «mort en carré». C’est à ce moment aussi que les hussards de Cumberland prennent la fuite vers Bruxelles dont la route s’est emplie de fuyards et de conducteurs ayant coupé les traits de leurs chevaux...
De loin tout cela ressemblait assez à une déroute et rendait le général Ziethen d’autant plus circonspect que des officiers anglais sont venus l’informer que leur armée était en difficulté. Il hésitait donc à risquer ses troupes (les consignes de prudence données par Gneisenau étaient claires).
C’est von Müffling en personne, l’attaché militaire prussien auprès des Anglais, envoyé en dernier recours par Wellington désespéré, qui convainc le chef du Ier corps prussien de s’engager sans délai, ce qui provoquera la rupture de la droite française au même moment que l’échec de la Garde sur l’aile gauche, ce qui déclenchera la panique générale et la déroute que l'on sait.