Croisements de cavaleries

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Croisements de cavaleries

Messagepar MANÉ Diégo sur 29 Déc 2009, 01:33

J'explicite le titre de ce post. Par "croisements" j'entends des unités adverses qui se "traversent", ce qui suppose que l'une au moins des deux formations "s'ouvre" pour laisser passer l'autre, cette dernière devant d'ailleurs s'ouvrir aussi pour ne pas heurter ceux qu'elle traverse.

Cela suppose encore que le "traverseur" va plus vite que le "traversé", ce dernier étant, le plus souvent arrêté ou au pas et l'autre au trot ou au galop.

L'idée première est que le plus rapide, bénéficiant de son écart d'allure favorable doit l'emporter.

Eh bien cette idée reçue n'entraîne pas règle. Parlant de règle, "Les Trois Couleurs" prévoit la classique traversée du vainqueur, mais aussi celle du vaincu qui, malgré un écart d'allure favorable est cependant battu en termes de pertes par son adversaire, plus lourd et/ou meilleur "bretteur".

Cette hypothèse vient d'être abondamment exposée dans le post "Hussards hongrois contre cavalerie légère française" où cette dernière, bien que traversée et re-traversée inflige deux fois plus de pertes à son "traverseur".

Je vous rappelle aussi l'exemple donné dans le dernier paragraphe de mes "NDL8. Lieutenant Chevalier..." où les Chasseurs à Cheval de la Garde "s'ouvrent" pour "laisser entrer" des Dragons britanniques... qui ne ressortiront pas.

Le forum de Frédéric Duprez, que je viens de vous indiquer dans les mises à jour de notre site, donne bien des exemples intéressants tirés des mémorialistes, et met par ailleurs en exergue le danger que représente la "collision" de deux cavaliers, d'autant plus grand qu'ils iront plus vite, comme deux voitures se heurtant dans un accident de la circulation, et de citer des occurrences mortelles.

Ceci pour aider à comprendre le passage que je vous donne, tiré du "Journal de la campagne de Waterloo" du capitaine Alexander Cavalié Mercer (page 86-87 de l'édition de 1933) qui commandait une batterie de la Royal Horse Artillerie, déployée sur le plateau attaqué par les Français :

"Parmi les multitudes de cavalerie française qui se répandaient sans arrêt du plateau en face, un corps dégringola la pente entière et se dirigea droit sur nous, lorsque tout à coup un régiment de dragons légers, que je crois être la légion allemande, sortit du ravin sur son flanc à un trot allongé.

Les Français eurent à peine le temps de faire face à gauche et de mettre leurs chevaux au galop que les deux corps se rencontrèrent. Ils étaient à une petite distance de nous, en sorte que nous vîmes la charge parfaitement.

Il n'y eut ni arrêt, ni hésitation de part ni d'autre. Les deux partis semblaient foncer de l'avant de la façon la plus téméraire et nous nous attendions tous à voir un choc effroyable. Rien de cela. Chacun, comme par consentement mutuel, ouvrit ses rangs en s'abordant et passa rapidement au travers de l'autre, pointant et sabrant, de la même manière qu'on passe ses doigts de la main droite parmi ceux de la main gauche. Nous en vîmes tomber très peu. Les corps se reformèrent ensuite et, en un clin d'oeil, tous deux disparurent je ne sais pas où, ni comment.

Il pouvait être environ deux heures, peut-être un peu plus tard..." (Ceci pour situer l'événement).

Bref, nous avions déjà des traverseurs et des traversés dans une relation vainqueur/vaincu ou vaincu/vainqueur, nous voilà désormais en outre avec des traverseurs/traverseurs, puisque restés tous deux à l'allure maximale, donc aussi techniquement un "écart d'allure zéro", et se générant des pertes "non significatives", soit une sorte de "match nul" ou "pétard mouillé", où les deux adversaires se sont neutralisés sans se faire mal tout en ayant donné à penser aux spectateurs qu'ils allaient s'écraser l'un sur l'autre et tomber morts ou blessés victimes de la collision... qui n'eut pas lieu.

C'étaient des cavaliers accomplis. Il y a encore peu, pour faire la même chose, il fallait un scénario, des chevaux dressés (et convenablement espacés) et des cascadeurs ! Aujourd'hui cela peut se faire sur ordinateur, en images de synthèse, à condition que les différents intervenants sachent comment cela se passait vraiment afin de le reproduire correctement, et là ce n'est pas encore gagné !

Je m'égare, direz-vous ? Peut-être, car il est bien tard, voire bien tôt, mais j'espère vous avoir donné à penser, et attiré votre attention sur le sujet, que peut-être à votre tour vous nourrirez de tel ou tel exemple que vous aurez lu, et qui viendra enrichir notre connaissance commune.

Sur ce bonne fin de nuit,

Diégo Mané
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