Les Deux-Siciles de la Révolution au retour partie II

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Les Deux-Siciles de la Révolution au retour partie II

Messagepar REMY Nicolas-Denis sur 21 Oct 2025, 15:29

Le premier retour (1799-1805)

La 1ere Restauration napolitaine
A l’issue du retour royal, une première épuration, qui sera sanglante, a lieu dans tout le pays continental. Le conseil général chargée de l’épuration de l'armée n'examinait que 110 officiers d'artillerie, alors que la république en comptait deux fois plus (213, dont 43 officiers côtiers). Seuls quatre d’entre eux se sont révélés absolument fidèles au roi. Il n’y eut certes qu’une seule condamnation à mort (un lieutenant), et une dizaine réintégrés pour diverses raisons, mais tous les autres partirent en exil, soit en France soit en Italie. Pour les autres armes, la perte était du même ordre en proportion des effectifs. Seules les troupes de La Sicile, qui disposait d’un règlement à part, tant pour les affaires militaires et pour les affaires civiles, n'étaient pas touchées par cette hémorragie et formait trois régiments d’infanterie, trois de cavalerie et une compagnie d’artillerie.

Avec le retour du contrôle de Naples, le roi cherchait aussitôt à reformer une armée mais cette fois épurée des éléments jacobins. Malgré l’envie, il ne pouvait construire que cinq régiments d’infanterie, vingt escadrons de cavalerie, cinq bataillons de chasseurs régionalisés et un bataillon léger albanais avec le recours au « truglio » (peines de prisons réduites contre engagements militaires). Les purges avaient eu un impact très profond car elles avaient touché beaucoup plus les officiers éduqués et tous les spécialistes.

A la fin de 1799, malgré tout, les Napolitains (Deux bataillons des régiments Regina Carolina II et Montefusco et un pour chacun des régiments Re Ferdinand°, ReginaCaralina 1. Samnites, Albanie et Alemagna plus un bataillon de grenadiers. Deux escadrons des régiments Re, Regina, Principe (dragons légers), quatre du régiment de Valdimazzara et quatre du régiment de Valdinoto) réoccupaient Rome et montaient jusqu’à Sienne mais devaient reculer devant les Cisalpins pendant l’hiver 1799. Après le retour de Bonaparte en Italie et pour éviter une nouvelle invasion une paix est immédiatement signée avec la France et tous les napolitains étaient de retour dans leur pays à la mi-avril 1801. la paix générale de 1801 montrait une armée de 28 109 h commandée par le Feldmarschall Damas se répartissant comme suit :
Nom unité Nombre d’hommes
Garde royale
Régiment de Grenadiers 394
Compagnie d’Hallebardiers Royaux 56
Infanterie
Régiment Re Ferdinando 960
Régiment Real Principe I 1428
Régiment Real Prince I 1084
Régiment Regina. Carolina I 1043
Régiment Regina Carolina II 995
Régiment Real Princessa 1133
Régiment de Calabres 1106
Régiment des Abruzzes 1084
Régiment de Sanniti 775,
Régiment de Montefusco 981
Régiment d'Albanais (étrangers siciliens) 696,
Régiment d'Alemagna (étrangers) 975
Régiment de Toscana Presidium (puis Reali Presidi) 914
Régiment de Valdinoto (sicilien) 508
Bataillon de Grenadiers de Valdemone (sicilien) 295
Bataillon de grenadiers de Valdimazzara (sicilien) 367
Bataillon de volontaires de Longone 407
Bataillon de volontaires d'Orbetello 370
Compagnie naturelle d'Ischia 155
Bataillon d'invalides 2107
Infanterie légère
Corps de chasseurs royaux 56
Bataillon de chasseurs de Campani 489
Bataillon de chasseurs Appuli 504
Bataillon de chasseurs calabrais 406
Bataillon de chasseurs Aprutini 557
Bataillon de chasseurs albanais 475
Bataillon de chasseurs samnites I 698
Bataillon de chasseurs Samnite II 578
Corps franc de Cavanni 117
Cavalerie
Régiment Re 560
Régiment Regina 552
Régiment Principe I 552
Régiment Principe II 254
Régiment Princessa 282
Régiment Valdinoto (Sicilien) -578

Régiment Valdimazzara (Sicilien) 578
Corps des Dragons légers (état-major) dissous en 1801 intégré au régiment Principe II 332
Corps du Mojanari 46
Artillerie et Génie
4 brigades d'artillerie 1112
Compagnie d'artillerie sicilienne 127
Artilleurs côtiers 860
Brigade de pionniers 360
Compagnie de pontonniers 57
Compagnie de constructeurs 66
Train et bagages 905
Corps d’ingénieurs du génie 28

Il est à noter qu’en octobre 1799, le corps royal d’artillerie était remplacé par l’artillerie royale et le Génie (qui comptait aussi le train). De plus, face à la rareté des artilleurs restant, car beaucoup étaient partis avec les Français, on formait des volontaires des unités d’infanterie à ce métier. Dans le même temps, les pontonniers étaient rassemblés et en 1800 une compagnie de pontonniers se trouvait constituée.

Une paix mal ressentie.
En 1800, après le retour au calme de la restauration des Bourbons-Siciles, 14 régiments d’infanterie (à deux bataillons de huit compagnies) et 4 de dragons provinciaux (à quatre escadrons) étaient reconstitués, alors que les milices urbaines. Le manque de chevaux à disposition de l’Etat faisait que nombre de réquisitions sur les riches propriétaires étaient réalisées. L’encadrement était fourni soit par des officiers en attente ou en retraite. Ces troupes avaient un entraînement à la fois de police et militaire mais souvent elles avaient une tenue de civil, surtout les miliciens.
Cependant le traité de paix obligeait la perte de terres frontalières et de payer des frais de garnisons françaises dans les comtés adriatiques et ioniens.
La charge financière induite par cette occupation grevait terriblement les ressources napolitaines. Dans un premier temps, le régiment Montefusco, qui s’était mal conduit pendant la campagne et les régiments de dragons légers étaient dissous. Les Grenadiers de la Garde incorporaient tous les bataillons de grenadiers (pour en faire deux chacun à quatre compagnies). L’effort que faisait le pays pour maintenir une armée digne de ce nom était important était important, si bien qu’en 1803, l’armée comptait 33 040 hommes entraînés. L’infanterie était organisée en quatre divisions (trois sur le continent et une en Sicile) chacune de deux brigades. La cavalerie restait avec huit régiments, les chasseurs avec sept bataillons et l'artillerie avec deux régiments. Dans le cadre de ces réaménagements, le système de recrutement a été modifié, ainsi que celui de l'hôpital, de sorte que l'ambitieux plan de modernisation des troupes provinciales a été drastiquement réduit (c'était le nouveau nom pris par les milices). Il en était de même pour les écoles, même si les Académies militaires étaient restaurées.

De plus, peu à peu plusieurs officiers, choisis parmi les moins compromis, reprenaient du service par les blocages d’avancements et les problèmes de règlement des soldes souvent causés par la cupidité des administrations les démotivaient très vite. C’était ainsi que les Napolitains avaient le plus grand mal à mettre sur pied un corps expéditionnaire de deux milles hommes chargés de neutraliser Malte, selon le traité d’Amiens. Ce corps occupait l’archipel à entre l’automne 1802 et le printemps 1803 sur exigence des Britanniques.

Ce coup de force, contraire au traité d’Amiens, faisait intervenir la France qui renforçait la présence, donc le coût pour Naples, sur son territoire. A ce moment-là, le Trésor napolitain devait payer à la France 220 000 ducats, soit un million de francs par mois, sans compter les pertes fiscales et douanières.
Cela provoquait dès le 28 juin 1803, l’arrêt des recrutements alors qu’il manquait 7387 hommes pour compléter les 33040 hommes pour atteindre le but du roi. La suspension des recrutements ainsi que le blocage substantiel sinon formel des promotions, qui s'ajoutaient aux relégations et à la perte d'ancienneté subies par tant d'officiers coupables d'avoir servi la république, rendaient une grande partie d'entre eux mécontents, ou du moins amorphes sans parler du mécontentement des soldats.
De plus, les interventions françaises soit par l’ambassadeur soit par le général en chef français, le général Gouvion Saint-Cyr provoquaient l’exil du premier ministre Acton (janvier 1804) et la dissolution de l’état-major. Cependant, les agents britanniques continuaient sans difficultés de recruter des troupes.

Après maintes cachoteries, un émigré français était choisi, le général (l’ex maréchal autrichien) Damas, avec le titre d’inspecteur pour recréer de façon cachée un état-major. Il insistait sur la formation des troupes… ce qui allait surtout servir Joseph Bonaparte. Il remettait aussi de l’ordre dans les écoles militaires et dans l’administration militaire napolitaine.
Il est a noté que l’infanterie était maintenant sans exception formée aux combats en terrain difficile, notamment en montagne ; chaque brigade et division disposait d’un état-major en propre.
Fin 1803, le gouvernement était restructuré par le roi Ferdinand IV qui orientait sa politique vers la préparation à la guerre. Un état-major royal permanent était institué avec une mission principale : faire des cartes. L’armée était réduite à 25000 hommes en octobre 1804 dont seulement la moitié était opérationnelle hors du territoire napolitain, faute de moyens logistiques. Par contre, les magasins étaient pleins, les troupes provinciales prêtes et le moral satisfaisant surtout contre les Français. La marine, elle, n’était pas touchée mais tous les programmes de constructions étaient stoppés par mesure d’économie. Cependant, les effets de ces problèmes politiques et financiers se faisaient ressentir surtout sur les écoles : les enseignements étaient ralentis et le nombre d’élèves diminuaient et avaient moins de moyens pour des exercices pratiques. Cela se percevait surtout pour les écoles d’artillerie et navales.

Une des mesures emblématiques du général en chef Damais était la constitution de manœuvres plurirégmentaires pour servir de modèles : Trois régiments de cavalerie étaient assemblés et entraînés ensemble. La même chose se faisait avec une brigade modèle pour l'infanterie à Capoue, sous le commandement du général Fardel la di Torrearsa. Puis, sous prétexte d'un cordon sanitaire contre une épidémie qui éclatait à Livourne, une expérience de mobilisation était menée qui, outre les résultats escomptés, produisait également une vive note de protestation française qui aboutissait, en janvier 1805, à l’éloignement du général Damas.

La guerre et la chute des Bourbons
La France avait également demandé que l'effectif de l'armée napolitaine soit réduit à onze mille hommes, ce à quoi la cour de Naples avait bien joué lorsqu'elle faisait remarquer : « l'armée est si faible qu'elle ne suffit pas à pourvoir les postes ». Napoléon laissait tomber cette demande et, tout en n'ignorant pas que la seule présence dans le royaume du corps du général Gouvion de Saint Cyr empêchait les Bourbons de prendre parti pour ses ennemis, il feignait aussi de croire aux protestations d'amitié napolitaines en retirant ses soldats italiens qui lui seraient plus utiles en Italie du Nord dans la guerre qui allait être menée contre l'Autriche. En septembre 1805, un traité d’amitié était même signé entre les deux états, alors que depuis août un traité d’alliance avec la Russie et les Britanniques étaient signés pour combattre les Français.
Le roi Ferdinand IV s’apprêtait à nouveau à laisser son armée prendre le terrain sans vraie préparation et une fois de plus les opérations débutaient dans la mauvaise saison. Cette fois, cependant, il y avait au moins la certitude d'un soutien allié direct : un corps expéditionnaire anglo-russe, fort de vingt mille hommes devait débarqué à Naples pour menacer, avec l'armée de Bourbon, par l'intermédiaire de l'État pontifical, le flanc sud du système impérial français. En effet, ce n’était que le 4 novembre que les préparatifs sont lancés (enrôlements, réquisitions de chevaux le 21, logistique et hôpitaux) et le 3 décembre le général Damas était nommé commandant en chef. Les Napolitains ne pouvaient lancés que 14000 hommes (la division sicilienne était laissée en place et recevait les recrues pour entraînements).

Les troupes anglo-russes-napolitaines auraient cependant pu prendre une certaine initiative ; au lieu de cela, leur commandant, le général russe Lascy, les maintenait fermement sur les frontières en attendant des nouvelles sur le déroulement de la campagne contre l'Autriche et quand au début de janvier 1806, il apprenait la nouvelle de la victoire de Napoléon à Austerlitz, il ordonnait le réembarquement immédiat d'Anglo-russes même si les troupes françaises les plus proches étaient à cette époque, sur la défensive, à Ancône et à Bologne. Abandonné, Ferdinand IV se retrouvait seul contre Napoléon et l’armée de Masséna. Surtout, il voyait ses terres continentales passer sous le contrôle du royaume de Naples de Joseph Bonaparte.
L’armée commençait à se désagréger et l’exemple venait des gradés, dont le salaire n’avait pas suivi. Ils marchaient à contre-cœur vers le sud, laissant leur habitation et famille dans la zone occupée par les Français. Sans vrai ravitaillement organisé dans le temps, les villes tombaient sans combattre sauf l’île de Gaeta, défendue par le margrave de Hesse-Philipstahl (il disposait d’un bataillon du Real Carolina II (recrues), un bataillon de chasseurs d’Appitii, de trois compagnies d’artilleries et de deux corps francs formés à partir de prisonniers graciés par le colonel Miehele Pezza, dit Fra Diavolo soit 5918), qui tiendra des mois et la cité de Civitella del Tronto avec des milices provinciales commandées par le major Wade du régiment Re. Il faut ajouter que le temps était très mauvais rendant les routes très difficiles.

Dans le même temps, les troupes britanniques, après accords du roi Ferdinand débarquèrent en Sicile et à Messine. A partir d’avril, le gouvernement se réorganisait et l’armée suivait le mouvement. Les régiments étrangers étaient dissous, et un nouveau « etrangeri » créé rassemblant tous les non-siciliens. Les régiments de chasseurs et de lignes non siciliens étaient dissous et les rescapés rassemblés dans le régiment « Real Samnites » ; la cavalerie suivait le même mouvement en fusionnant les régiments non siciliens dans le « Real Principe ». En dehors de Gaeta et de la Sicile, il ne restait que quelques rebelles et surtout des Britanniques. Ces derniers remportaient la victoire sur les troupes du général Reynier le 4 juillet de Maïda (ou Sant’Eufemia) relançant la révolte générale et relevant le moral du roi Ferdinand. Il décidait, malgré le retrait de la botte italienne des Britanniques, de lancer une expédition avec un bataillon du « Real Sanniti » sur Reggio di Calabra.
La situation changeait brutalement avec la prise de l’île de Gaeta. Les Français poussaient vers le sud et rassemblaient derrière le roi Guiseppe (Joseph Bonaparte) les notables puis les populations alors que les Siciliens étaient évacués. Seuls les Calabrais résistaient et de nombreuses villes étaient brûlées, comme Maratea. En septembre 1809, Reggio di Calabra tombait après un court siège. A Naples, "la decenio francese" commençait alors que les Siciliens passaient complètement sous le contrôle britannique et surtout de la Royal Navy.
REMY Nicolas-Denis
 
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