1812. La légion portugaise

[MANÉ Diégo]

J'ouvre ce post, dédié à la Légion Portugaise en 1812, car le sujet m'a paru insuffisamment traité par ailleurs, puisque j'ai moi-même été "enduit avec de l'erreur", et ne dois pas être le seul.

"L'inventeur" est Didier Thomas qui à demandé à jouer portugais dans le cadre de la manifestation "Polotsk 2012 à Lyon", dont j'extrais ce qui suit car d'essence plus historique que ludique :

"Portugais dis-tu ? Je gage que tu n'auras pas beaucoup de concurrence pour le rôle... Je les avais virés au Parc d'Artillerie, mais en ton honneur je vais les en rappeler, histoire de leur donner l'occasion de se racheter le 18 août (notre remake) de leur conduite de la veille."

Extrait d'après Marbot (T3 p 112) :

"L'infanterie française, les Bavarois, les Croates, combattaient bravement, et même avec avantage; mais la légion portugaise et surtout les deux régiments suisses fuyaient devant les Russes, et ne s'arrêtèrent que lorsque, poussés dans la rivière, ils eurent de l'eau jusqu'aux genoux !...
Là, contraints de faire face à l'ennemi sous peine de se noyer, ils combattirent enfin, et par un feu de file des mieux nourris, ils obligèrent les Russes à s'éloigner un peu."

Bon, c'est du Marbot, et manifestement il n'aimait pas les Portugais, les ayant déjà "pourris" dans sa relation de kliastitzy (p 84) :

"... une forte colonne de grenadiers russes, attaquant nos alliés de la légion portugaise, les mit dans un désordre complet...".

Il reste que notre brave chef du 23e Chasseurs à Cheval, qui sera blessé ce jour-là, est le seul à mentionner les Portugais dans ces deux occurrences, alors que tous les autres auteurs que j'ai pu lire les situent au Parc d'Artillerie, ce qui semble conforté par le fait qu'ils n'eurent aucun officier de blessé de toute la campagne avant La Bérézina, où en revanche ils en eurent beaucoup !

Si quelqu'un à des infos relatives je suis preneur !"

Bon, çà c'était dans le post "Polotsk 2012 à Lyon", pour introduire la suite...

Diégo Mané

[MANÉ Diégo]

La légion portugaise (par Diégo Mané, octobre 1812)

Eléments tirés de «La légion portugaise 1807-1813» par le Cdt Boppe, Paris, 1897.

Cette unité, à l’origine constituée au Portugal par Junot de militaires portugais afin de les éloigner de leur patrie tout en fournissant sous d’autres cieux de la chair à canon à l’Empereur, a été envoyée en France en 1808, deux bataillons ayant cependant été engagés à Zaragoza.

Présente à Wagram la légion donne, et sous Oudinot quand on donne on donne bien...
On reçoit, aussi !

Mais allons tout droit à 1812 qui motive ce petit article.

La légion se compose alors d’un petit régiment de cavalerie qui fera toute la campagne avec l’Etat-Major impérial, et de trois régiments d’infanterie à deux bataillons de 6 compagnies chacun.

Les deux premiers seront de l’ «Armée de Moscou», au IIIe corps du Maréchal Neÿ.

1er régiment, dit d’élite, Colonel Freyre Pego
1er bataillon, CdB Caldeiro, 18 officiers, 575 hommes.
2e bataillon, CdB Treindé, 18 officiers, 565 hommes.

2e régiment, CdB Sarmento (puis Major Xavier), 49 officiers, 1.432 hommes.
1er bataillon, CdB Munizz
2e bataillon, CdB Sarmento

Le 26 Mai 1812, sur la demande du Maréchal Neÿ, le régiment est autorisé à créer des compagnies d’élite, ce qui confirme bien qu’il n’en avait pas avant.

Ces deux régiments formeront à Moscou, avec le 24e de ligne, la brigade Delage, toujours au IIIe corps du Maréchal Neÿ. Il leur restera au 1er Octobre 1812 :

1er régiment, Colonel Freyre Pego, 32 officiers et 206 hommes.

2e régiment, Major Xavier, 32 officiers et 184 hommes.

Le 3e régiment fit la campagne à l’aile gauche au IIe corps d’Oudinot, division Legrand.

3e régiment, Major de Castro, 39 officiers et 1.648 hommes à fin Janvier 1812.
1er bataillon, CdB Blanc
2e bataillon, CdB de Martigny

Ces deux bataillons sont clairement stipulés à six compagnies de fusiliers chacun.

Lettre du Ministre de la Guerre à l’Empereur suite à la revue passée le 31 janvier 1812 à Auxonne.

«Le régiment, à l’exception de 143 Portugais qui y ont été maintenus, est composé d’Espagnols qui ont été enrôlés dans les dépôts de prisonniers de guerre. Tous les officiers à l’exception de deux Français sont Portugais. Les hommes sont de bonne volonté, forment une belle troupe, sur laquelle il paraît qu’on peut compter.»

Revue du général Heudelet, passée à Mayence le 27 Mars 1812 :

«Espèce d’hommes belle et robuste, savent assez bien le maniement d’armes, peu les manoeuvres.»

Bref, voici de bons soldats espagnols, commandés par des officiers Portugais (cela n’a pas dû aller de soi), au service de la France au fin fond de la Russie.

Et donc, en plus de manoeuvrer mal sous des chefs haïs dans un territoire hostile, ils furent mal commandés au sommet (Oudinot) dans une guerre qui ne les concernait pas.

On peut au moins comprendre qu’ils devaient souffrir d’un profond manque de motivation.

Diégo Mané

[MASSON Bruno]

Des Espagnols commandés par des Portugais dans l'armée Française, l'Eurocorps avant l'heure, quoi.

En tout cas les interférences entre ces deux éléments auraient mérité une relation journalière, ça devait être complètement ubuesque