Organisation des armées de Savoie - Piémont - Sardaigne sous la Révolution et l’Empire
(par Ludovic Isnard pour Planète Napoléon, 2005 et 2021)
I. Période : septembre 1792 - mai 1796
La guerre dans les Alpes
Infanterie de Ligne et Légère
Régiments d’ordonnance nationale (avec numéro d’ordre) :
En théorie chaque régiment compte 1385 hommes, compter 1000 h en pratique ; chaque bataillon est à 4 compagnies de fusiliers (123 h) , 1 compagnie de grenadiers (123 h) , 1 de chasseurs (55 h) et 1 de réserve (136 h au dépôt) et un état-major.
• 1- Régiment des Gardes, 2 bat.
• 2- Régiment de Savoie, 2 bat.
• 3- Régiment de Montferrat, 2 bat.
• 4- Régiment de Piémont, 2 bat.
• 5- Régiment de Saluces, 2 bat.
• 6- Régiment d’Aoste, 2 bat.
• 7- Régiment de la Marine, 2 bat. (2ème bataillon apparu en 1786)
• 8- Régiment de Chablais, 2 bat. (« Etranger » avant 1793 et devenant Alessandria en 1796)
• 9- Régiment de la Reine, 2 bat. (2ème bataillon en 1786)
• 10- Régiment de Sardaigne, 2 bat.
• 11- Régiment de Lombardie, 2 bat. (créé en 1786 suite à la réorganisation de l’armée)
• 12- Régiment d’Oneglia, 2 bat. Constitué après 1792 à partir de la compagnie d’élite des régiments de la marine (ou anciennement bataillon des frégates) tout d’abord appelé « Régiment Nouvelle Marine ». Sa compagnie de chasseurs lui est adjointe en 1794, ses grenadiers en 1795 (Krebs). Recruté dans le comté de Nice il s’agit des équipages de la marine sarde.
Régiments d’ordonnance étrangère (avec numéro d’ordre) :
• 1- Royal-Allemand, 2 bat. (Lutren)
• 2- Suisse-Valaisan, 2 bat. (De Courten 1782, De Streng 1795),
• 3- Suisse-Bernois, 2 bat. (De Rochmondet 1787, Stettler 1794),
• 4- Suisse-Grisons, 2 bat. (Christ),
entre 1792 et 1793, recrutement des unités suivantes :
• Régiment suisse de Schmidt, 1 bat. (2 bat. Courant 1793)
• Régiment suisse de Zimmerman, 2 bat.
• Régiment suisse de Bachmann, 2 bat.
• Régiment suisse de Peyer-ein-hoff, 2 bat.
(ces nouveaux régiments suisses coûteront le double des régiments nationaux, seront toujours incomplets et n’égaleront jamais la valeur des troupes nationales (Pinelli)
Régiments d’ordonnance provinciale (avec numéro d’ordre) :
Les bataillons sont à 4 compagnies de fusiliers, une de grenadiers et une de volontaires.
Les compagnies de chasseurs des régiments provinciaux seront recrutées progressivement : en 1793, Maurienne et Novare ; en 1794, Mondovi, Ivrée, Asti, Vervcelli ; et enfin en 1796 Genevois et 2 nouvelles compagnies pour Asti.
• 1- Régiment de Genevois, 2 bat. (était Chablais avant 1774)
• 2- Régiment de Maurienne, 2 bat. (était Tarentaise avant 1780)
• 3- Régiment d’Ivrée, 2 bat.
• 4- Régiment de Turin, 2 bat.
• 5- Régiment de Nice, 2 bat.
• 6- Régiment de Mondovi, 2 bat.
• 7- Régiment de Verceil, 2 bat.
• 8- Régiment d’Asti, 2 bat.
• 9- Régiment de Pignerol, 2 bat.
• 10- Régiment de Casal, 2 bat.
• 11- Régiment de Novare, 2 bat.
• 12- Régiment de Tortone, 2 bat.
• 13- Régiment de Suse, 2 bat. (créé en 1786 suite à la réorganisation de l’armée)
• 14- Régiment d’Acqui, 2 bat. (créé en 1786 suite à la réorganisation de l’armée)
En 1792 l'infanterie provinciale compte 14 bataillons de guerre (684 h), 14 de garnison (380 h), 14 compagnies de réserve de 270 h) et 448 canonniers.
Réorganisée en janvier 1793 elle comprendra 32 bataillons de fusiliers (de 400 h), 28 compagnies de grenadiers (de 100 h), 9 compagnies de chasseurs (de 60 h), 14 compagnies de réserve (de 270 h) et 448 canonniers organisés en 16 pelotons.
Troupes d’élite provinciales (génie) :
• La Légion des campements est créée en 1775. Sa tâche est de préparer les camps d'instruction annuels des régiments provinciaux, de jouer le rôle des pionniers, sapeurs et de flanqueurs de l'armée en campagne. Elle prélève ses effectifs parmi tous les régiments provinciaux qui lui fournissent des hommes de toutes spécialités. Ses bataillons étaient basés initialement à Chieri (magasins principaux), Chivasco, Rumilly et Chersaco.
Elle compte 1640 h en 1792 :
• 4 Bataillons et 21 compagnies à pied (1230 h répartis en 825 fusiliers, 200 grenadiers, 50 chasseurs, 50 pionniers, 50 canonniers).
• Un régiment à cheval des campements comprenant 400 hommes dont 300 dragons et 80 carabiniers à cheval.
En 1793, cette légion est dissoute et ses effectifs forment de 2 nouveaux régiments à pied :
• Grenadiers du Roi, 2 bat. comprenant des compagnies de grenadiers et des compagnies de chasseurs (1793) G. Cavallieri. (commandé par le marquis savoyard de Bellegarde, moins connu que son frère, le futur feldmarechal au service de l'Autriche).
• Pionniers, 2 bat. (sera employé dès sa formation aux travaux de fortification autour de Turin)
Le régiment de cavalerie des campements sera versé dans la cavalerie de ligne.
En 1793 on pérennise le regroupement des compagnies de grenadiers et de chasseurs issues des bataillons des régiments d’infanterie. Ces formations étaient fréquemment utilisées avant et ces dispositions ne font que mettre en ordre cette pratique :
Grenadiers :
• 1er Bataillon : Comp. des Gardes, d’Asti, de Casale
• 2ème Bataillon : Comp. de Savoie, de Marine, de Turin
• 3ème Bataillon : Comp. de Novare, Suse, de Saluces
• 4ème Bataillon : Comp. d’Aoste, de Courten, de Mondovi
• 5ème Bataillon : Comp. de Montferrat, de Piémont, de Rockmondet,
• 6ème Bataillon : Comp. de Royal Allemand, de Chablais, de Genevois
• 7ème Bataillon : Comp. de Maurienne, d’Yvrée, de Pignerol
• 8ème Bataillon : Comp. de Nice, de la Reine, de Sardaigne
• 9ème Bataillon : Comp. de Christ, de Lombardie, d’Acqui
• 10ème Bataillon : Comp. de Novare et Oneglia en 1792 (Krebs cite la création de la comp. de grenadiers d’Oneglia seulement en 1795).
• 11ème Bataillon: Comp. de Zimmerman, de Bachmann, de Peyer-ein-hoff, à la création de ces régiments.
Chasseurs :
• 1er Bataillon : Comp. des Gardes, de Saluces, d’Aoste, de Courten, de la Reine, de Christ, de Sardaigne, de Lombardie
• 2ème Bataillon : Comp. de Montferrat, de Piémont, de Royal-Allemand, de la Marine, de Savoie, de Chablais.
En mars 1796 ces deux bataillons sont regroupés sous le commandement du Colonel Marquis de Colli-Ricci
Infanterie Légère
En dehors des régiments d’ordonnance, la réorganisation de l’armée en 1775 avait amené la création d’une unité légère particulière ayant pour tâche principale la garde des frontières et la chasse aux contrebandiers :
• Légion légère à 4 bataillons et une compagnie de dépôt, 2200 h environ.
En avril 1795 la légion légère est dissoute et forme 2 nouvelles unités :
• 1er Régiment léger
• 2ème Régiment léger
Régiments à 2 bataillons : 4 compagnies de fusiliers, 1 de grenadiers, 1 de chasseurs.
Troupes de garnison
• le corps de garnison (740 h) est formé fin 1792 pour encadrer les milices. Formé d’anciens soldats aguerris, on lui ajoutera deux nouvelles compagnies en 1793.
Milices et Corps Francs
Milices
Après la perte de la Savoie et de Nice fin 1792 un décret institue la levée des milices pour suppléer principalement les troupes de ligne dans le service de garnison et des places fortes. Chaque compagnie de milice doit avoir au maximum 48 hommes de troupe ou au minimum 36 (état-major en plus), deux compagnies forment une centurie et 6 compagnies un bataillon dont les officiers sont choisis par l’état-major de l’armée.
Les centuries sont à 100 hommes sauf aux endroits précisés :
• Acqui, 20 centuries
• Alba, 20 centuries
• Alexandrie, 14 centuries
• Aoste, 10 centuries
• Biella, 7 centuries
• Casale, 15 centuries
• Possano, 4 centuries
• Fenestrelles, 14 centuries à 840 hommes au total
• Ivrée, 20 centuries
• Loano, 9 centuries font 558 hommes
• Mondovi, 40 centuries
• Mortora, 12 centuries
• Novare, 14 centuries
• Arona, 1 centurie
• Oneille, 42 centuries font 2604 hommes
• Pignerol, 14 centuries
• Valdesi, 25 centuries font 1500 hommes
• Saluces, 20 centuries
• Savigliano, 5 centuries
• Suse, 10 centuries
• Tortone, 29 centuries
• Valenza, 4 centuries
• Verceil, 12 centuries
Au total 391 centuries et 35.602 hommes.
• Il convient d’ajouter la milice urbaine de Turin qui compte 2500 hommes.
Dans les années qui suivent, d’autres milices seront recrutées dans les même régions pour remplacer certaines de ces premières levées qui seront incorporées dans quelques régiments provinciaux.
Les miliciens portaient un uniforme vert sombre pour les distinguer des troupes de ligne. Veste et manche blanches, matelotte et retroussis jaune, parements ? (rivolte) rouges, boutons blancs et cravate noire. Ils portaient un chapeau à la Frédéric comme toutes les troupes, sauf les troupes de corps francs qui se distinguaient par un chapeau à bord relevé vers le haut.
Pour les deux provinces de Savoie et du Comté de Nice, occupées par les Français le gouvernement n’eut quasiment pas le temps de lever des troupes de milices. Au lieu de cela, des corps francs et des volontaires y prirent les armes pour constituer d’excellentes troupes qui combattirent aux cotés des troupes régulières (tout particulièrement dans le Comté de Nice).
Corps Francs
Ces corps francs sont utilisés pour le harcèlement des communications ennemies, les coups de mains de partisans mais aussi aux cotés des troupes de ligne dans de nombreux combats.
• la compagnie franche, qui existe déjà avant le déclenchement des hostilités contre la France, est en 1792 portée à 800 h et divisée en deux corps :
• Compagnie nationale (Savoyards et Piémontais)
• Compagnie française (Français émigrés et déserteurs)
• fin 1792 le Comte Malabailo di Canale, ancien officier des gardes, monte une centurie (donc 2 compagnies) de chasseurs carabiniers (337 h). En 1793 les chasseurs carabiniers de Canale passent à un bataillon. Le recrutement se compose parfois de contrebandiers liguriens et de quelques éléments peu recommandables. Si leur réputation ne sera pas très bonne, on leur reconnaîtra une fougue et une énergie peu communes.
• En mars 1793 Filippo del Carretto, Marquis de Camarana, commande un second corps francs composés de déserteurs graciés (2 compagnies) rejoints par des émigrés français. Ce corps deviendra les Chasseurs de l’émigré français Bonnaud (ou Bonneaud) en 1793 et sera à 2 compagnies. Ils seront utilisés pour de nombreuses missions difficiles (on les retrouve au combat de Gilette vers Nice en 1793 notamment).
À partir de 1794, les corps francs se multiplient, organisés en un grand Corps Franc de 13 compagnies (2133 h) :
• les Chasseurs de Piano : 150 h initialement qui passeront à 2 compagnies de 307 h 6 mois après leur formation.
• le Corps franc de Pandini
• les Chasseurs (carabiniers) de Martin Montu-Beccaria (150 h)
• Compagnies de La Rocque : une compagnie régulière et une franche, volontaires niçois.
• les Chasseurs niçois de Radicati (2 bataillons) qui auront une excellente réputation.
• Pour assurer une meilleure discipline dans ces corps francs on les réunira sous le seul commandement de Borgarelli D’Isone (1795 environ). Le corps franc compte alors 11 compagnies de 160 h :
1-Pandini
2-Buriasco
3-Saissi
4-Francini
5-Martin
6-Bovarino
7-Rivarona
8-Patono
9-Piano
10- De Bonneaud
11- de réserve
Ne resteront en dehors de cette structure que les seuls chasseurs niçois formés en deux bataillons de 4 compagnies (1500 h en tout) car on les considère comme des troupes d’élite compte tenu de leur excellent comportement au combat.
Cavalerie
Les régiments sont à 4 escadrons de 2 compagnies. Les escadrons sont à 93 hommes dont 64 cavaliers avant l'entrée en guerre, des effectifs bien moindres que les régiments des autres nations. De fait en 1792 la cavalerie ne pourra mobiliser que 16 escadrons (chacun de 132 hommes dont 100 cavaliers) les 16 autres escadrons (109 h chacun) servant en garnison.
Depuis 1786 et la réorganisation de l’armée, la cavalerie se voit dotée pour chaque régiment d’une compagnie d’élite : chasseurs à cheval d’élite pour les régiments de cavalerie et grenadiers à cheval pour les régiments de dragons.
En 1794 le niveau de la compagnie, en tant qu’unité administrative de base, est supprimé et les régiments ne fonctionnent plus qu’en escadrons qui ont toujours été la formation tactique utilisée sur les champs de bataille. En outre depuis 1775 la cavalerie est organisée fictivement en deux ailes de deux brigades chacune.
En tête de liste des unités combattantes de cavalerie viennent les :
• Gardes du Corps à 3 compagnies (120 h) : 1ère Savoyarde, 2ème Piémontaise et 3ème Sarde.
Aile des Dragons :
• Dragons du Roi, 4 esc. (recruté en Savoie)
• Dragons de la Reine, 4 esc. (recruté en Piémont)
• Dragons du Piémont, 4 esc. (recruté en Piémont)
• Dragons du Chablais, 4 esc. (recruté en Savoie)
Le régiment des dragons de Sardaigne ne fait pas partie des ailes de cavalerie et sert en Sardaigne avec sa propre organisation. Il contribuera notamment à repousser les assauts français sur cette île en 1792 avec l’aide des milices locales. Parmi les assaillants se trouvait à l’époque un certain capitaine d'artillerie Bonaparte … (Franco Apicella)
• Dragons de Sardaigne, 2 esc. (212 h)
Aile de la Cavalerie :
Cavalerie Lourde :
• Savoie Cavalerie, 4 esc. (recruté en Savoie)
• Royal-Piémont, 4 esc. (recruté en Piémont)
• Aoste Cavalerie, 4 esc. (recruté en Piémont)
Cavalerie légère :
• Chevau-légers de Sa Majesté, 4 esc. (recruté en Savoie)
Artillerie et Génie
• 4 Bataillons d’artillerie (2156 h en juillet 1792)
• 1 Compagnie d’ouvriers et de mineurs,
• 2 bataillons de pionniers (cités plus haut comme appartenant à la Légion des campements)
Maison du Roi et divers
• Gardes suisses
• Gardes à pied
• Dragons de la Chasse
• Compagnie d’invalides
• en 1792 on réunit en une seule troupe de 1000 h les hommes chargés de l’approvisionnement des troupes, les « Dragoni di provianda ».
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À suivre...