par MANÉ Diégo sur 30 Avr 2011, 15:54
J'ai pu consulter le Napier sur la question, ce qui complétera les données d'Oman, Fortescue et autre Beamish communiquées par Bruno, sans préjudice des éléments fournis par les "Dispatches".
Tiré donc du Napier*, en substance...
Le 23 au matin la cavalerie française attaque vivement l’arrière-garde de Cotton, composée de “la cavalerie” et de “quelques” pièces de RHA commandées par Norman Ramsay et le Major Downman, et de deux bataillons d’Allemands sous Colin Halket, ainsi que les “partidas” (bandes) de guérillas Marquinez et Sanchez, ce dernier de l’autre côté de l’Arlanzon (et donc “hors-jeu”).
Dès sept heures du matin les piquets sont vigoureusement chassés du pont de Baniel. Repliés sur leurs soutiens vers le ruisseau Hormaza (Hormazuela) ils résistent quelque temps, le Captain Perse du 16e LD fournit une charge "d'une bravoure distinguée".
Toutefois la cavalerie française force finalement le passage et la britannique se replie derrière Cellada del Camino et prend position dans une plaine, flanquée sur sa gauche par des hauteurs garnies par Marquinez et sur sa droite par la rivière Arlanzon.
Au milieu de la plaine courait un ruisseau marécageux, franchissable uniquement par un petit pont près d’une maison nommée Venta del Pozo. A mi-chemin entre Cellada et ce pont se trouvait un fossé profond, franchi par un deuxième pont devant un petit village. Cotton se retira immédiatement au-dela de Venta del Pozo, laissant Anson au niveau du fossé avec Halket. Le 11th LD et les canons étaient restés en arrière-garde à Cellada.
Malgré une "bravade" (là c'est mon opinion) de deux escadrons sous le Major Money (payée cash !) et quelques boulets, les Français ne s’arrêtaient pas, et les escadrons britanniques se repliaient sur le reste de la brigade tandis que l’artillerie filait directement sur la position de Venta del Pozo.
Cependant le général français Curto menait une brigade de hussards (probablement la brigade du colonel Merlin de l'Armée du Nord : 1er Hussards et 31e Chasseurs) sur les hauteurs et, soutenu par les dragons de Boyer (Boyé), mettait Marquinez en déroute. Un ravin profond entourait ces hauteurs, ne laissant que quelques passages. Les partidas galopèrent vers le tout premier, les hussards sur leurs talons, au moment même où les éléments de tête des Français dans la plaine (probablement les 13e et 14e Chasseurs) attaquaient le 11th LD.
Ce dernier chargea, rejetant la première ligne ennemie sur la seconde, mais les deux revenant ensemble à la charge les Britanniques furent rapidement chassés vers le fossé, dont ils purent franchir le pont grâce à la surprise provoquée par l’infanterie allemande qui tenait le fossé et le village et tint la cavalerie française à distance le temps nécessaire.
Les hussards débordant déjà cette position par les hauteurs, Anson retraita en ordre vers Venta del Pozo sous la protection du 16th LD. A ce moment les partidas de Marquinez, mêlées aux hussards français, vinrent se jeter dans le flanc gauche du 16th LD alors qu’il se trouvait attaqué de face par les Dragons de Boyer (Boyé) qui avaient franchi l’obstacle.
Marquinez fut blessé, et le colonel Pelly du 16th LD, avec un officier et 30 de ses hommes, tomba aux mains des Français, le reste étant poussé en désordre sur les réserves. Les vainqueurs, eux-mêmes en désordre, durent se reformer, et Anson en profita pour franchir le pont de Venta del Pozo et rassembler son monde sur la gauche de la route, où les bataillons de Halket et les canons avaient déjà pris position, ainsi que la cavalerie lourde allemande, “une masse imposante”, qui se tenait en ligne sur la droite et plus en arrière que l’artillerie.
Jusque-là l’action avait été soutenue, côté français, par la cavalerie de l’Armée de Portugal, mais désormais les cavaliers de Cafarelli (de l’Armée du Nord), composés des Lanciers de Berg, du 15e Dragons (Chasseurs !) et de quelques escadrons de gendarmes, tous frais, arrivèrent en ligne sur le ruisseau. Le constatant infranchissable, ils prirent instantanément la courageuse décision de faire par le flanc droit et, malgré le tir nourri de l’artillerie (beaucoup de bruit pour rien), de trotter à travers le pont pour se former de l’autre côté face aux dragons allemands, avec le ruisseau à dos.
La situation était périlleuse pour eux en cas d’échec mais ils étaient "pleins de fougue" et, bien que les Allemands, qui en avaient laissé trop passer, les chargèrent à fond et rompirent leur droite, la gauche des Français prit l’avantage, et les autres se rallièrent. Un corps à corps furieux au sabre prit alors place, mais les gendarmes combattirent "si farouchement", que les Allemands, "malgré leur taille et leur courage", perdirent du terrain et finalement fuirent en désordre. Les Français les suivaient en criant et la brigade Anson, de ce fait débordée et menacée sur ses deux flancs, recula à son tour.
Malheureusement pour elle, les Dragons de Boyer (Boyé), suivant les collines, avaient franchi le ruisseau à Balbaces (Balbases, à 4 km de là !) et arrivaient comme la foudre sur sa gauche. Alors les Britanniques rompirent leurs rangs, et les trois régiments mélangés reculèrent en désordre. Les Dragons Lourds allemands, ayant pu finalement distancer leurs poursuivants, s’étaient reformés en arrière et les LD se rallièrent derrière eux.
Gendarmes et lanciers, qui avaient souffert sévèrement de l’artillerie (zéro perte !) et du corps à corps s’arrêtèrent, mais les Dragons de Boyer (Boyé), formant 10 escadrons, revinrent à la charge avec d’autant plus de résolution que les rangs alliés présentaient moins d’assurance et flottaient à leur approche. Les deux lignes antagonistes étaient à cent yards l’une de l’autre lorsque les officiers allemands s’avancèrent, suivis de leur troupe... un court instant, mais l’ennemi était trop puissant, le désordre se remit dans les rangs et seule la vitesse des chevaux anglais prévint une terrible catastrophe, et bien qu’une autre position favorable se présenta plus loin, permettant à la ligne de se reformer, ce ne fut que pour se rompre à nouveau de la même manière.
Toutefois Wellington, "qui était présent", avait disposé l’infanterie de Halket et les canons de manière à soutenir la cavalerie. Ces unités attendaient calmement leur tour d’entrer en action jusqu’à ce que les cavaliers ennemis en pleine poursuite après leur dernière charge leur présentent le flanc en passant. La supériorité de l’infanterie fut manifeste. Une pluie de balles fit vider les étriers à des quantités de cavaliers français jusque-là victorieux et qui, après trois tentatives futiles contre les carrés, battirent en retraite vers les collines, laissant la cavalerie alliée se replier sous la protection des fantassins de Halket...
Les pertes de ce combat furent très considérables des deux côtés**. Les Français souffrirent davantage, mais prirent un colonel (Pelly) et 70 autres prisonniers..."
** Compte tenu des derniers éléments glanés par ces échanges, et corrigés dans le PDF mel,
je trouve 372 Français, dont les 160 dragons perdus inutilement et ne relevant pas du combat de cavalerie proprement dit, contre 514 Alliés dont une centaine d'Espagnols de Marquinez.
* Pages 182-184, T3, “History of the war in the Penisula”, par W. F. B. Napier, Paris, 1839.